Monte Rotondo


                C'est le 26 juillet 1998, lors de notre randonnée à Maniccia que nous avons approché pour la première fois le deuxième sommet de Corse : Monte Rotondo. A peine à un kilomètre de nous, à peine 100 mètres plus haut, mais totalement inaccessible ce jour-là depuis la cime du grand lac d'où nous avions pris cette photo... Nous retrouverons nous là haut un jour ?
                Le lendemain sans doute, je connaissais déjà par cœur les différentes voies d'accès de ce sommet décrites dans le guide Didier Richard. La montée à partir du refuge « Petra Piana, Michel Fabrikant » sur le GR20 semblait relativement aisée, mais elle nécessitait une nuit dans ce refuge ; quant aux autres voies, il fallait compter plus de 5 heures de marche pour la branche aller avec un dénivelé supérieur à 1500 mètres, et quelques petites difficultés techniques en prime. L'option par Maniccia et le vallon de Cavacciole est en fait aussi possible, mais nous ne l'apprendrons que par la suite.
                Parmi les nombreuses voies possibles évoquées en fin de cette page, nous avons choisi celle qui débute au terminus de la D723, une minuscule route qui s'engage vers l'Ouest au niveau du pont du Vecchio, cet ouvrage conçu par Gustave Eiffel emprunté par la voie de chemin de fer se frayant un passage entre Corte et le col de Vizzavona.
                C'est cette dernière option qui me paraît la plus sûre, car elle rejoint au lac de Bellebone, quelques 300 mètres sous le sommet, la voie classique par le refuge de Petra Piana : ainsi nous retrouverons peut-être quelques randonneurs du GR20 désirant réaliser ce sommet... Mais quand allons nous faire une tentative ? En tout cas, ce ne sera pas pour les vacances 1998 qui se terminent, ni pour les vacances 1999, il reste beaucoup de sommets plus faciles au programme, et Thomas n'a que 9 ans. En 2000, nous logeons près de Porto Vecchio, et Monte Rotondo, ce n'est pas la porte à côté ; en 2001 même lieu de séjour, mais trois ans d'attente, cela commence à être long : tant pis pour les délais de route...



(I) Monte Rotondo, première tentative
Le 21 août 2001


                Aguerris par les précédentes randonnées de la saison, nous nous lançons dans l'aventure. La météo semble bonne, quelques bourgeonnements nuageux sont prévus en montagne, mais il ne devrait pas y avoir d'averses orageuses. Départ un peu avant quatre heure du matin, la nationale d'abord, ensuite la traversée nocturne du col de Sorba entre Ghisoni et Vivario. Nous nous engageons sur la minuscule D723, et lorsque nous arrivons près des bergeries de Puzzatello, la route est bouchée par... un troupeau de mouton dormant sur la route. Il nous faut bien cinq minutes pour passer cet obstacle car les moutons ne montrent guère d'empressement à se lever...


                Aux premières lueurs de l'aube, nous arrivons au bout de la route goudronnée ; une piste praticable sur quelques deux kilomètres devrait nous rapprocher de notre objectif : la piste est à peu près correcte mais étroite. Peu avant l'arrivée, nous sommes barrés par un virage fortement raviné totalement impraticable avec notre voiture. Impossible de faire demi-tour ou de garer la voiture sans boucher la piste... Nous déchargeons la voiture, Sophie, Sarah et Thomas vont pouvoir tranquillement prendre leur petit déjeuner ici. Guidé par David à pied -il fait encore très sombre- je me lance dans la plus longue séance de marche arrière de ma vie (un bon quart d'heure), pour me garer au petit parking au bout de la route goudronnée. Nous rejoignons les autres au pas de course, avalons rapidement notre petit déjeuner, et au moment de mettre mon sac à dos je m'aperçois que la carte IGN est restée dans la voiture ! David est le plus sportif de nous cinq, il veut bien faire un petit footing pour aller la chercher...
                Presque une heure de perdue à cause de cette piste, espérons que nous n'aurons pas d'autres avatars. Sept heures du matin, le sentier est bien marqué, nous sommes en forêt et nous aurons bientôt droit au lever du soleil au-dessus des montagnes. A la lisière des bois, nous longeons la bergerie de Gialghello, et nous apercevons le col de Tribali vers 1600 mètres d'altitude que nous atteindrons vers 8h45. Devant nous s'ouvre la vallée du Manganello empruntée par le GR20 : un bon sentier descend doucement vers le fond de vallée pour le rejoindre. Cette option permettrait d'atteindre le refuge de Petra Piana et donc le Rotondo : elle nécessiterait une heure supplémentaire, mais serait sans doute plus facile que notre itinéraire (encore une variante possible, parmi les voies évoquées en bas de cette page).
                Notre sentier, quant à lui part horizontalement pour rejoindre au bout d'une demi-heure la bergerie de Muraccioli. Nous sommes intrigués par plusieurs personnes s'affairant autour des moutons. Nous apprenons que ceux-ci sont en train d'être vaccinés pour ne pas succomber à cette maladie ovine qui sévissait fortement en Corse en 2001. Nous faisons connaissance avec la bergère qui nous explique un peu sa vie quotidienne ; elle nous présente son âne avec qui elle descend deux ou trois fois par semaine par le chemin que nous avons emprunté... Comme il fait déjà bien chaud et que nous avons consommé plus d'eau que prévu, nous demandons à la bergère si nous pouvons compléter nos gourdes. Elle nous explique que c'est une excellente idée car l'année précédente, un randonneur revenant du Rotondo s'était présenté à sa bergerie, complètement assoiffé ! Nous sommes donc invités à entrer chez elle, les enfants se rendent compte que le confort n'est pas tout à fait le même que chez nous. Ce n'est pas si facile que cela d'avoir accès à l'eau froide, car le tuyau d'arrivée noir bien au soleil sert à produire ses réserves d'eau chaude... La bergère s'affaire donc un certain temps avec ses différents tuyaux et robinets avant de pouvoir nous offrir l'eau fraîche de sa source !
                Cette pause fort passionnante nous a retardé d'une bonne demi-heure. Il est plus de neuf heures, et il nous reste encore près de quatre heures de marche si tout se passe bien. Encore une demi-heure de sentier relativement horizontal, puis la trace maintenant plus fugitive monte en lacets vers le Nord, à flanc de montagne. Le cheminement approximatif est porté sur cette photo prise depuis Migliarello. La montée est assez pénible sous la chaleur. C'est en arrivant vers 1900 mètres (trait bleu sur la photo) que nous apercevons au loin, à peu près à notre altitude, le refuge Petra Piana, symbolisé à gauche sur la photo. C'est à ce moment-là qu'un obstacle se présente à nous, avec un cairn placé dans une direction peu engageante. Comme dans pareilles situations, nous nous éparpillons aux alentours pour essayer de trouver un passage. Au bout de quelque temps, il faut se rendre à l'évidence, c'est bien le cairn qui nous montre la voie...
                Il faut commencer par escalader un petit obstacle nécessitant un peu d'agilité (ou alors de jouer à la courte échelle), et immédiatement après, il faut évoluer pendant deux ou trois mètres sur un rebord étroit et en dévers. Si on dévisse, on a droit à une glissade de quelques mètres finissant... dans les aulnes ! Ceux qui ont goûté aux aulnes touffus et à leurs égratignures comprendront que cette perspective sans être bien dangereuse n'est pas très rassurante ! Ce jour-là, nous n'avions pas emmené notre corde qui aurait peut-être été rassurante. Les enfants, David en tête, passent l'obstacle, mais Sophie n'est vraiment pas inspirée par ce passage, et il lui faudra bien longtemps avant de se lancer sur le rebord. Quant à moi je passe en dernier, pas très rassuré non plus, puisque j'éprouve même le besoin de m'accrocher à quelques ridicules petites touffes d'herbe...
                Arrivés sur de belles dalles inclinées juste au-dessus de cet obstacle, nouvelle question : si elles sont mouillées arriverons-nous à passer par là sans glisser ? Or un gros nuage est en train de gonfler au-dessus de la vallée du Manganello, et il me paraît un peu trop joufflu, alors qu'il est à peine onze heures du matin. Il faut se rendre à l'évidence, le sommet du Rotondo, ce ne sera pas pour aujourd'hui ; Le lac de Bellebone est encore envisageable, mais auparavant, nous décidons de déjeuner sur les dalles pour observer l'évolution de la météo. Nous prenons bien notre temps, et les nuages continuent à prendre de l'ampleur, je suis même étonné de ne pas apercevoir d'averse sous le gros nuage de la vallée du Manganello. C'est décidé nous ne continuerons pas plus loin aujourd'hui. Si, juste quelques minutes pour vérifier qu'il n'y a pas de nouvel obstacle près d'ici.
                Assez curieusement, l'obstacle est franchi bien plus rapidement dans le sens de la descente, et nous poursuivons tranquillement jusqu'à la bergerie pour un nouveau brin de conversation avec la bergère. Descente sans histoire par le col de Tribali, vers le parking où nous arrivons vers 15 heures, après nous être un peu rafraîchis sur les bords du ruisseau Vecchio que nous longeons vers la fin de la balade. Les nuages, quant à eux se sont bien assagis : il n'y aura pas d'averse. Décidément, plusieurs de nos décisions se sont révélées mauvaises aujourd'hui...
                Au « parking », notre voiture est bien isolée, mais quelqu'un est assis sur le muret à proximité. Il nous demande ce que nous sommes venus faire dans ce coin perdu... Après nous avoir raconté quelques anecdotes relatives à la bergère de Muraccioli, et à son âne, nous avons droit à des explications détaillées sur un emplacement non loin d'ici, dans la vallée de Paratella où les truites foisonnent. Comme le coin a l'air splendide, nous y irons peut-être un jour. Constatant que nous étions plus intéressés par la baignade que par les truites, il nous indique un de ses autres coins secrets : Il s'agit de vasques tout à fait exceptionnelles avec de nombreuses possibilités de sauts, accessibles après une demi-heure de marche à partir de la RN 193. Il nous explique précisément comment trouver le départ du cheminement, et un peu plus tard, nous vérifierons que celui-ci est réellement introuvable sans cette explication. Nous le découvrirons en fait trois ans plus tard, et vous retrouverez cet emplacement dans le chapitre « Lieux de rêve », Vasques du Vecchio...
                Certes nous sommes déçus de ne pas être montés au Rotondo -ce sera pour l'année prochaine-, mais nous garderons le souvenir de la rencontre de deux habitants de la Corse profonde, avec chaque fois un accueil très chaleureux, ce qui est d'ailleurs très courant dans les zones peu fréquentées.



(II) Monte Rotondo, deuxième tentative
Le 19 juillet 2002


                Le 19 juillet 2002, onze mois plus tard, c'est reparti pour une deuxième tentative, par le même itinéraire, avec une première partie bien défrichée... Nous logeons plus près, et en partant à quatre heure du matin, nous arrivons vers cinq heures trente au parking vers 1000 mètres d'altitude ; hors de question de s'engager sur la piste ! Il fait déjà jour, car nous sommes plus près du solstice d'été. Petit déjeuner rapide, et c'est parti peu avant six heures du matin.
                Nous arrivons au virage de la piste, pour nous apercevoir que celui-ci a été bétonné depuis l'an dernier !!! Nous aurions pu gagner près d'une heure à pied entre l'aller et le retour ! Ce n'est pas bien grave, mais un peu enrageant tout de même. Cette année, nous rencontrons le berger de Gialghello avec qui nous prenons le temps de parler de l'itinéraire du Rotondo qu'il connaît. En revanche nous ne verrons pas la bergère de Muraccioli. Cap vers l'obstacle où nous avions fait demi-tour l'an dernier. En moins de cinq minutes, tout le monde passe sans la moindre hésitation ! Il n'est pas encore 9 heures, nous avons deux heures d'avance par rapport à l'an dernier!
                A partir d'ici, le cheminement devient particulièrement original : tantôt nous évoluons sur des dalles, tantôt dans des failles entre d'énormes blocs rocheux compacts, tantôt sur de vraies petites pelouses le long d'un petit ruisseau, tantôt une petite étendue d'eau, tantôt une minuscule pozzine... Bref un spectacle varié et grandiose, très différent de ce que nous avions connu en Corse jusqu'ici. Cela ressemble parfois à un labyrinthe, mais à chaque option, un cairn nous indique le chemin -j'espère qu'il en sera de même au retour, les points clés sont difficiles à bien mémoriser tellement ils sont nombreux-. Quel dommage que ce trajet soit si peu fréquenté !
                Il est 10h30 environ lorsque nous arrivons vers 2300 mètres au Lac de Bellebone, le plus grand lac de la région. David et moi avions admiré ce lac lors de notre balade à Maniccia quatre ans plus tôt ; ce coin me rappelle un peu le lac de Capitello et son environnement, tout y est encore un peu plus grandiose, et il n'y a personne ! Comme nous avons pris un mini petit déjeuner cinq heures plus tôt, nous avons tous bien faim, et décidons de manger au bord du lac. Les sacs à dos seront ainsi plus légers, nous en laisserons d'ailleurs trois d'entre eux ici pour faciliter l'évolution sur les quelques petits passages d'escalade facile qui nous attendent là haut.
                Un groupe de randonneurs arrive en provenance du refuge de Petra Piana : comme je l'avais envisagé, cette dernière portion est donc un peu plus fréquentée. Pendant la fin de notre repas, nous observons bien leur itinéraire vers l'aiguille isolée très caractéristique (visible à gauche sur le montage photo) ; elle donne son nom au col du fer de lance, qui est également accessible à partir de la vallée de la Restonica. L'an dernier déjà, comme cette fois-ci d'ailleurs, Sophie avait envisagé l'option de nous attendre au bord du lac, avec éventuellement un ou deux enfants, mais cette idée ne semble même plus l'effleurer, ni aucun enfant d'ailleurs. A onze heure, nous nous engageons donc tous les cinq avec peu d'affaires pour cette dernière étape.
                Le tronçon sur pierriers qui mène à l'aiguille est assez raide, mais plutôt facile. Ensuite, il faut suivre plus ou moins la ligne de crête, avec quelques passages où il faut se servir des mains, mais ceux-ci sont bien plus faciles que celui de ce matin, qui nous avait donné tant de mal l'année précédente. Nous arrivons à l'abri Helbronner vers midi (une petite cabane avec une porte en bois), avant de grimper les trois derniers mètres nous séparant du sommet à 2622 mètres d'altitude. Nous y retrouvons le groupe de tout à l'heure ainsi qu'un couple qui avait emprunté un itinéraire par la Restonica.






                Premier regard vers Maniccia, la montagne pelée à gauche sur la photo panoramique : Il y a quatre ans nous étions là-bas et nous nous demandions si nous arriverons un jour au sommet du Rotondo... Vue plongeante sur le lac de Bellebone bien sûr, mais aussi sur le lac d'Oriente avec ses pozzines. Plus petit, le lac de Galiera (du nom du pic voisin), si caractéristique qui pointe vers Paglia Orba, comme le montre la photo centrale à droite (sans nuages) empruntée à Jean-Luc L'Hôtellier, vous la retrouverez sur son site. Nous devinons même le lac de Nino. Suivant la position des nuages, de nombreux autres sommets sont visibles, par exemple la pointe des sept lacs dominant le lac de Capitello qu'on aperçoit également, mais aussi Monte Renoso, Monte d'Oro et Migliarello; c'est depuis ce dernier sommet, huit jours plus tôt, que nous regardions Rotondo avec une forte envie de réussir notre deuxième tentative.
                Dommage que la couverture nuageuse limite le champ de vision, ce n'est pas la journée idéale : le lendemain par exemple, il n'y aura aucun nuage à l'horizon... Par ailleurs les nuages accrochent maintenant certains passages de notre itinéraire, ce qui ne me rassure guère compte tenu du cheminement peu évident. Du coup je préfère lever rapidement le camp : nous resterons à peine un quart d'heure au sommet, ce qui déplaît un peu à mes coéquipiers. En redescendant vers le lac, nous croisons un groupe d'une dizaine de personnes en provenance du refuge de Petra Piana, mais après avoir récupéré nos sacs à dos, plus personne.
                Malgré quelques nuages que nous devons traverser, nous n'aurons finalement pas trop de mal à retrouver notre chemin, même si deux ou trois fois, il y a eu discussion sur la route à suivre. C'est plus facile à cinq : il y a toujours quelqu'un qui trouve l'argument décisif pour retrouver la bonne option. Ce n'est qu'après avoir retrouvé -et franchi- le passage délicat que nous seront définitivement rassurés, d'autant que plus haut, les nuages accrochent de plus en plus l'itinéraire.
                A nouveau la bergerie de Muraciolli, nous ne saluerons pas la bergère, puis vers 15h30, le col de Tribali, et là surprise : une couche très dense de nuage culminant au niveau du col. Après une dernière pause au soleil, il faut bien s'engager dans le brouillard, nous n'en ressortirons qu'à la bergerie de Gialghello, 150 mètres plus bas ; avec les nombreuses traces laissés par les moutons, ce n'est pas si facile que cela de retrouver cette bergerie sans beaucoup de visibilité... alors que le trajet entre le col et la bergerie s'effectue tellement facilement à vue !
                Petite discussion avec le berger que nous retrouvons, nous parlons bien sûr de la balade, et de notre étonnement de l'absence de randonneurs empruntant cet itinéraire. Pourtant la deuxième partie vers le lac de Bellebone, le lac lui-même et bien sûr le Rotondo méritent vraiment l'effort. Dernier tronçon pour retrouver vers 17h30 notre voiture, toujours aussi isolée sur le petit parking... Nous sommes tout de même bien fatigués après 11h30 de balade, quelques 1650 mètres de dénivelé positif, et guère plus d'une heure de pause au total.



(III) Survol de Monte Rotondo
Le 9 août 2005








                Le survol de la région de Monte Rotondo, ce 9 août 2005 a été pour nous l'occasion de retrouver des points de repères que nous connaissions bien, comme par exemple le lac de Bellebone, A Maniccia ou le col du Fer de Lance... Mais c'était aussi l'occasion de visualiser notre itinéraire prévu quelques jours plus tard : le Monte Rotondo par le lac d'Oriente, et de vérifier au passage que la cabane du sommet était toujours présente... car une nuit y était programmée !



(IV) Monte Rotondo avec nuit dans la cabane au sommet
Les 17 et 18 août 2005


                Parmi les principaux objectifs en 2005, nous avions planifié une nuit dans l'abri Helbronner au sommet de Monte Rotondo, afin de pouvoir y profiter d'un coucher de soleil, et le lendemain faire le tour des crêtes surplombant les lacs de la Restonica, bien facilité par l'altitude déjà acquise. Nous étions exigeants pour les conditions météo car nous cherchions deux journées consécutives, avec très peu de nuages, et peu de vent. Durant les 15 premiers jours d'août, toutes ces conditions ne furent jamais vraiment réunies.
                Les prévisions pour la montagne corse du 16 au soir semblaient presque parfaites : le 17 à peine quelques petits cumulus sans vent, un début de nuit du 17 au 18 étoilé, avec des nuages d'altitude le matin, une évolution diurne le 18 avec du beau temps le matin puis des cumulus finissant par bourgeonner en donnant quelques averses en fin d'après-midi... A la rigueur quelques gouttes en fin de deuxième journée restaient fort acceptables d'autant plus qu'à l'expérience, la météo montagne en Corse me semble en général plutôt pessimiste.
                Départ assez tardif pour une fois (5h15 sont prévues dans le guide Didier Richard pour les 1590 mètres de dénivelé), après quelques difficultés pour garer la voiture, nous partirons vers 10h30. Pour la première partie de la balade, allez donc voir dans le chapitre chouettes randonnées : Le lac d'Oriente. Il aurait été dommage de ne pas réserver une page pour cette balade vers le plus chouette des lacs corse, à notre avis en tout cas...
                Départ à 16 heures du lac d'Oriente, en route pour le sommet. Le sentier bien cairné offre une vue somptueuse sur le lac d'Oriente. De nombreux arrêts photo sont donc au programme. Plusieurs belles petites cuvettes herbeuses se succèdent avant d'aboutir au pied de la muraille terminale. A notre droite la chaîne du Cinto se découvre au fur et à mesure que nous gagnons de l'altitude par rapport à la ligne de crête au Nord Ouest.
                Aux premiers névés quelques boules de neige sont échangées entre David et Thomas. Paglia Orba apparaîtra peu de temps après, puis nous commencerons à dominer le lac Galiera, le plus haut des lacs corse avec ses 2442 m d'altitude. Le raide couloir débouchant au collet situé à l'Ouest du sommet est plutôt plus facile qu'il ne le paraît, et quelques minutes plus tard, l'arrivée au sommet...








                Un coup d'œil à l'abri, histoire de vérifier qu'il sera bien utilisable, puis un long tour d'horizon sur toute la Corse... sans aucun nuage... contrairement à la fois précédente ! Nous reconnaissons bien entendu beaucoup de sommets proches ou lointains... En commençant par le Nord et en tournant dans le sens des aiguilles d'une montre, voici les plus significatifs pour nous (les neufs dernières photos ci-dessus sont dans le même ordre)
- Monte Pinerole avec le trajet de l'avant-veille vers l'arche de Corte (que nous ne trouvons pas sans jumelles) et la forêt de Meli bien visible, elle ; plus loin les aiguilles de Popolasca et à droite, Corte et sa vallée
- Monte San Petrone au loin puis l'arête principale du Rotondo qui se prolonge jusqu'à Montre Cardo ;
- plein Est, à quelques mètres notre abri, qu'il faut rejoindre avec précaution ;
- une vue dos au soleil d'une bonne partie de la côte et de la plaine orientale ;
- toute la zone de l'arc principal de la Corse comprenant Punta Dell'Oriente, Monte d'Oro, Monte Renoso, Punta Alla Vetta, avec entre ces deux sommets Bocca della Cagnone, ce col au-dessus duquel se profile Punta Scaldasole et au loin Monte Incudine, puis un tout petit peu plus à droite, Migliarello ;
- le lac de Bellebone et au loin la baie d'Ajaccio ;
- Maniccia toute proche, et plus loin Monte Cervellu devant la baie de Sagone et à sa droite le lac de Capitello malheureusement à l'ombre dans son bénitier ;
- Capu d'Orto au loin au-dessus de Porto et de son golfe, et plus près exactement dans la même direction, Lombarduccio ; ensuite le lac de Nino qui se détache bien dans sa vallée ;
- enfin Paglia Orba bien sûr, puis le sommet de la Corse, Monte Cinto et son massif.
                Nous finissons par nous réfugier dans l'abri car il ne fait plus très chaud, et le vent s'est levé –tiens, ce n'était pas prévu au programme-. A cinq nous avons largement assez de place (on pourrait même y serrer une dizaine de personnes), nous déplions habits chauds et duvets, et dînons dans l'abri à cause du vent qui à l'air de forcer, avec ce bruit particulier provoqué par le toit en tôle ondulé... heureusement, il est fort bien fixé et il n'y a pas de claquements de tôles.
                Après le dîner nous ressortons, bien emmitouflés cette fois pour assister au coucher du soleil... Quel dommage, des nuages bien épais à l'Ouest cachent le soleil bien avant son rendez-vous avec la mer... Je commence à me faire quelques soucis pour le lendemain, car le vent et les épais nuages vers l'Ouest semblent annoncer le mauvais temps plus rapidement que prévu.




                Nous n'avons plus le choix : nous nous fourrons dans nos duvets dès la tombée de la nuit, et sommes largement bercés par le bruit du vent, puis à plusieurs reprises par celui de la pluie... Comme rien de cela n'est conforme aux prévisions (même pas de celles enregistrées en fin d'après-midi obtenues avec le téléphone portable), je passe une bonne partie de la nuit à me demander à quoi va ressembler le secteur à l'aube... Je suis assez pessimiste pour le programme du lendemain.
                Je sors le premier de l'abri vers 6h45 pour constater qu'il n'y a pas de nuages ni à notre niveau ni plus bas (ouf...) mais que le ciel est bien sombre à l'Est ce qui explique la pluie précédente, qu'il va faire beau pendant un certain temps mais qu'une couche bien épaisse au loin vers l'ouest va sans doute nous arroser à nouveau. Le vent quant à lui s'est bien calmé.
                Dans l'incertitude totale de l'évolution de la météo, je propose d'abandonner le programme de la journée, et de redescendre au plus vite par la voie de la veille. Tout le monde est d'accord avec cette prudente décision. Nous sautons le petit-déjeuner et rangeons rapidement nos affaires pour pouvoir profiter de l'éclaircie lors de la descente de la partie un peu exposée, d'autant plus que les rochers sont maintenant relativement secs.




                A peine avons nous redescendu le couloir, il se remet à pleuvoir, une pluie pas bien forte, mais persistante : entre 7h30 du matin et 11h00, nous n'aurons eu qu'une seule accalmie de 15 minutes au lac d'Oriente qui nous ont permis d'y faire un petit brunch improvisé. Nous sommes surpris de croiser plusieurs randonneurs montant au sommet malgré la pluie... Il faut dire que même si la visibilité n'est pas terrible, aucun nuage ne vient accrocher la montagne pour l'instant...
                C'est eux qui auront raison, car l'éclaircie de 11h00 s'est révélée être définitive, et il n'y aura pratiquement plus un seul nuage jusqu'au soir, avec une excellente visibilité (alors que la météo du matin prévoyait une aggravation dans l'après-midi) !
                Nous passerons une partie de l'après midi sur une plage avec vue sur Monte Rotondo, histoire de nous consoler un peu... Cette fois-ci la prudence n'a pas été bonne conseillère, mais nous ne regrettons pas notre décision qu'il fallait prendre pour éviter une éventuelle galère avec les éléments à notre disposition à 7h00 du matin... Et puis le point clé de notre projet, c'était de passer une nuit au sommet de Monte Rotondo ; c'est bien de cela dont nous nous souviendrons tous les cinq, sans oublier la sieste au lac d'Oriente...


(V) Monte Rotondo, avec bivouacs aux bergeries de Riviseccu
Le 24 août 20011

Six années plus tard, en août 2011, Monte Rotondo était à nouveau au programme lors d’un trek de plusieurs jours visant également Monte Cardo. La deuxièe partie de ce trek Cardo et Rotondo correspond à l'itinéraire de montée par les bergeries de Rivisecco et le lac de Pozzolo. Par sa beauté et sa variété, ce trajet délaissé mériterait largement de devenir un grand classique...



(VI) Monte Rotondo, suite...

                Nous avons adoré, et malgré la difficulté, nous espérons bien retourner au Rotondo un jour. Les itinéraires sont nombreux et variés, mais tous assez longs. Vous les trouverez dans le guide Didier Richard « 261 itinéraires de randonnées pédestres » avec d'ailleurs quelques variantes en alpinisme. Et pour un autre regard, voici la description de l'ascension de Monte Rotondo via le lac d'Oriente par un botaniste, en 1908...
                Voici les principales options pour une randonnée à la journée :

Itinéraire 1 : 1850 mètres de dénivelé pour 6h15 de marche (sans doute le moins fréquenté), décrit sur la page du trek Cardo et Rotondo
Pont de Rivisecco près de la D623 (785m), bergerie de Spiscie (1650m 3h), lac de Pozzolo (2350m 5h15), sommet (2620m 6h15) par le col de fer de lance ou par le « sous-marin de poche ». Itinéraire 2 : 1600 mètres de dénivelé pour 5h15 de marche (la voie normale, décrite dans le troisième chapitre de cette page)
Pont de Timozzo près de la D623 (1030m), bergerie de Timozzo (1520m 1h30), lac d'Oriente (2060m 3h30), sommet (2620m 5h15) par le collet ou par le couloir Nord Est. Itinéraire 3 : 1400 mètres de dénivelé pour 5h30 de marche (non repertorié dans le guide Didier Richard)
Parking de la Restonica (1370m), Vallon de Cavacciole, Col du sac à dos (2450m 3h45), lac de Bellebone (2320m 4h30), jusqu'ici la première partie d'une des épreuves du « grand raid inter-lacs » (voir Maniccia) puis la montée finale jusqu'au sommet (2620m 5h30). Itinéraire 4 : 1900 mètres de dénivelé pour 7h00 de marche (sans doute la voie la plus facile, mais aussi la plus longue)
Hameau de Canaglia, terminus de la D23 (720m), Cascade de Meli (920m, 1h10), GR20 jusqu'au refuge Petra Piana (1840m 4h30), lac de Bellebone (2320m 6h00) sommet (2620m 7h00). Itinéraire 5 : 1650 mètres de dénivelé pour 5h45 de marche (celui décrit dans les deux premiers chapitres de cette page)
Parking du terminus de la partie goudronnée de la D723 (1000m), Col de Tribali (1590m 1h50), Bergerie de Muraccioli (1650m 2h20), lac de Bellebone (2320m 4h45) sommet (2620m 5h45).

                Un dernier petit conseil : Si vous vous lancez dans le GR20, et si quelques passages un peu délicats en randonnée (ou très faciles en alpinisme) ne vous font pas peur, prévoyez donc une demi-journée pour Paglia Orba à partir du refuge Ciottulu di I Mori et et une autre demi-journée pour Monte Rotondo à partir du refuge Petra Piana, et bien plus facile, une dernière demi-journée pour Monte Renoso à partir du refuge de Capanelle : Si la météo le permet, ces balades seront sans nul doute les plus belles étapes de votre parcours.


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