Depuis notre première ascension de Paglia Orba en 2003, nous avions fréquenté à plusieurs reprises ses environs immédiats sans y remonter ; nous avons même dormi au campement du refuge de Ciottulu en 2008. Ce refuge étant une étape de notre trek programmé en 2010, j'avais la ferme intention de retourner à Paglia Orba, de préférence par les cheminées de Foggiale. Compte tenu des aléas sur notre programme initial, Sylvain, Philippe et Arnaud on accepté avec enthousiasme d'y consacrer une demi-journée ; Sylvain avait déjà réalisé ce parcours deux ans auparavant, et Philippe au siècle dernier avec ses enfants en bas âge ! Impossible en revanche de convaincre Sophie qui préfère se reposer au campement du refuge, compte tenu des cheminées et des efforts passés et à venir... |
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Nous voilà donc partis ce 29 juin 2010, à 8h30 du matin, en direction de l'Epaule de Foggiale (2301m), première étape avant d'atteindre les cheminées. Même si une montée en ligne droite vers l'épaule est possible d'après les topos, nous avions estimé la veille que le terrain sur cet itinéraire ne semblait pas très agréable, et nous préférons donc rejoindre les contreforts Sud-ouest de Paglia Orba en faisant un détour par le bon sentier se dirigeant vers le col des Maures. Peu de temps après avoir quitté ce sentier, nous sommes récompensés en apercevant un groupe d'une dizaine de mouflons : comme visiblement, nous les dérangeons, ceux-ci s'enfuient vers le col des Maures pour se réfugier sur le versant Ouest de Paglia Orba. La face Est de Capu Tafonatu est merveilleusement éclairée par le soleil matinal, et au fur et à mesure de notre ascension, son œil s'entrouvre pour laisser apparaître le ciel. Nous longeons les névés encore présents au pied des falaises, sur un cheminement agréable qui nous permet de rejoindre l'Epaule de Foggiale en moins d'une heure. Après une pause photo, nous constatons que le départ vers les cheminées n'est pas forcément limpide, car de nombreuses fissures verticales se détachent dans la paroi... Philippe repère très vite un passage possible depuis le sommet d'un névé, mais préfère partir en reconnaissance, car les premiers mètres semblent un peu délicats et exposés. En poursuivant, Philippe trouve assez rapidement la première cheminée, alors que nous cherchons en vain d'autres départs potentiels, d'autant plus que Sylvain ne reconnaît pas le départ. Après une demi-heure, nous devons nous résoudre à nous engager dans la voie ouverte par Philippe. Elle est plus facile que prévu, à la montée en tout cas ; nous avons mis une demi-heure pour nous en rendre compte ! Après avoir parcouru une bonne cinquantaine de mètres vers le Nord-Est, nous découvrons la cheminée inférieure. Celle-ci n'est pas très haute (une dizaine de mètres peut-être), mais profondément entaillée. Philippe se sépare de son sac à dos, ramone la cheminée sans aucune difficulté apparente, et nous lance sa corde pour hisser, un à un, nos petits sacs à dos de la journée. Je passe en deuxième, et constate qu'elle est effectivement relativement facile à escalader. Comme la corde de Philippe n'était pas encore rangée, je préfère me faire assurer sur les deux derniers mètres, pour constater très vite que la sortie ne pose réellement aucune difficulté. D'ailleurs Arnaud et Sylvain se passeront sans hésitation de cette corde. Une vingtaine de minutes après avoir quitté l'Epaule de Foggiale, nous sommes tous au sommet de la cheminée inférieure. Se pose un problème pour la seconde cheminée : Sylvain qui avait réalisé tout seul cet itinéraire deux ans auparavant affirme qu'il n'a pas de souvenir précis sur la seconde cheminée et nous indique la direction à prendre... Grâce à quelques cairns, Philippe trouve effectivement une cheminée, mais elle ne correspond pas à ses souvenirs. Je me souviens quant à moi du topo de Michel Fabrikant, qui indiquait qu'il fallait redescendre de quelques mètres dans la direction opposée (vers l'Ouest). Nous y trouvons effectivement une cheminée haute de vingt-cinq mètres environ, très certainement la cheminée supérieure. Sylvain n'était manifestement pas passé par cette dernière, ce qui semble montrer qu'il existe une variante. Après avoir convaincu Sylvain que c'était la bonne option, Philippe montre l'exemple en s'engageant donc dans la cheminée supérieure, et en la ramonant, à nouveau sans aucune difficulté. Sa configuration est relativement différente de la cheminée inférieure ; au départ, elle ressemble plutôt à un couloir cheminée très incliné et très entaillé avec plusieurs ressauts intermédiaires qui permettent de bien reprendre pied ; dans sa partie supérieure, elle devient carrément un tunnel d'abord oblique puis vertical à la sortie. Sa configuration ne permet pas facilement de hisser les sacs à dos avec la corde ; je pars donc sur les traces de Philippe avec le sac tantôt sur le dos, tantôt posé sur un rocher, lorsque quelques petits passages nécessitent de se mettre en opposition dos à la paroi. Les deux ou trois derniers mètres sont plus techniques, mais on s'extirpe du conduit sans trop de difficultés, avec le dos collé sur une des parois certes un peu rugueuse, et de bonnes prises de pied sur la paroi opposée. Arnaud, puis Sylvain ramonent la cheminée à leur tour ; mais depuis le bord supérieur, compte tenu de la configuration, on ne peut être témoin visuel et donner des conseils que sur les trois derniers mètres. Nous avons mis plus de temps que prévu : une bonne heure entre l'Epaule de Foggiale et la sortie de la cheminée supérieure... située aux alentours de 2390m, donc moins d'une centaine de mètres au-dessus de l'Epaule ; en tout cas, je suis content d'avoir réussi avec mes collègues cette voie, qui même si aucun équipement n'est nécessaire me paraît du domaine de l'alpinisme. La suite de l'itinéraire est naturelle, facile et même cairnée, et une dizaine de minutes plus tard, nous retrouvons la voie normale à l'Est de la Combe des Chèvres puis nous arriverons au sommet autour de 11h30, quelques trois heures après notre départ. |
Un cairn imposant est venu concurrencer la croix fixée au sommet de Paglia Orba alors que dans mes souvenirs, il était tout petit en 2003, ... Mais c'est surtout la vue à 360° qui a une nouvelle fois monopolisée mon attention, et fait crépiter le déclencheur de mon appareil photo, malgré une atmosphère brumeuse, surtout vers le sud. Vous trouverez le tour d'horizon complet et annoté sur la page mon village et mes voisins du chapitre II. J'ai bien sûr une attention toute particulière pour nos balades récentes dans le secteur : A tout juste 1km, le col de Serra Pianella que nous avons tenté de franchir en 2009 avec Sophie et Philippe ; un peu plus loin, Punta Minuta dont j'ai gravi l'arête Sud ave Philippe en 2009 ; Punta di e Cricche avec Sophie en 2009 ; Capu a a Cuccula avec Sophie, Arnaud, Elisabeth et Serge en 2008 ; Capu Scaffone avec Phillipe et Daniel en 2008... et la veille, le sommet de Capu Tafonatu avec Philippe et Sylvain, sans oublier son trou avec la même équipe accompagnée de Sophie et Arnaud ! Voici qu'apparaît au sommet un jeune couple bien équipé... Ce n'est qu'à son arrivée que j'aperçois un petit chien qui était du voyage : il logeait dans un harnais attaché sous le sac à dos de Monsieur ! D'après ce que j'ai compris, ce couple d'allemands, et leur chien... sont arrivés eux aussi par les cheminées de Foggiale ! |
Lorsque je jette un coup d'œil sur la montre, je m'aperçois qu'il est déjà midi passé, et que nous allons donc largement dépasser l'heure prévue de retour que j'avais annoncée à Sophie (autour de 13 heures)... Je propose donc à mes camarades de remettre le cap sur Ciottulu, par la voie normale, bien sûr. Après un parcours sur sentier, le premier obstacle à franchir est le petit ravin qui aboutit à la Combe des Chèvres. Il faut louvoyer entre les gros blocs, et même franchir un petit névé, descendre à 2400 mètres puis remonter à 2450 mètres à proximité du sommet ouest. C'est à partir de là que l'environnement commence à être impressionnant, que ce soit vers Capu Tafonatu ou vers la vallée de Laoscella, et les reliefs à l'Est de cette vallée. Nous aurons même une vue plongeante sur la vire de l'Andatone, qui apparaît au-dessus d'une brèche qui permet de faire le tour de Capu Tafonatu... Nous arrivons sur une petite plate-forme où nous avons quelques hésitations pour rejoindre la suite du parcours : Philippe choisit l'option directe, alors que, sans doute guidé par mes souvenirs, je me retrouve sur la petite vire qui nous avait tant impressionné en 2003, Sophie et moi . Même si le vide est impressionnant, je la trouve aujourd'hui particulièrement facile... et Philippe à qui j'avais parlé de cette vire la trouve carrément ridicule ! C'est vrai que son ampleur n'est pas du tout comparable à celle des vires de Capu Tafonatu par exemple... Nous arrivons ensuite au sommet du couloir cheminée, le passage techniquement le plus difficile de la voie normale... Au contraire de mes souvenirs je suis ici fort impressionné par ce que nous avions alors réalisé avec nos trois enfants ! Je franchis ce passage assez rapidement avec Philippe, et nous faisons une pause, autour de 2220m en surplomb du col des Maures en attendant Arnaud et Sylvain qui semblaient moins à l'aise sur ce type de terrain, et faisaient de nombreux arrêts photos. Nous faisons face à Capu Tafonatu, et identifions les vires que nous avons empruntées la veille pour monter au trou et au sommet... Vu d'ici, ces itinéraires semblent, mais alors totalement invraisemblables ! Nous essayons également de deviner le parcours entre le col des Maures et la brèche très marquée en prolongement de l'arête Nord du Tafonatu : il s'agit en effet d'un des tronçons initialement au programme de notre trek... Au bout d'une dizaine de minutes nous appelons nos collègues ; pas de réponse... Philippe remonte voir s'ils ont eu un problème... il les retrouve en train de nous chercher sur une autre variante qui rejoint le vallon du col des Maures bien plus en aval, en fait sur la variante que nous avions prise en 2003. Après avoir perdu une vingtaine de minutes, nous voilà enfin tous regroupés au-dessus du col des Maures, pour une descente finale vers le col, puis le refuge, sans autre difficulté que le franchissement d'un névé peu incliné. Nous retrouvons le campement à 14h15, avec une bonne heure de retard... Sophie commençait bien sûr à s'inquiéter sérieusement. Elle semble toutefois contente de sa matinée de repos... d'autant plus que nous avions prévu cet autre trajet à réaliser dans l'après midi. Le souvenir de cette seconde ascension de Paglia Orba, et ses cheminées de Foggiale restera gravé dans ma mémoire, même si le parcours est moins esthétique que celui de la voie normale. Sylvain, quant à lui, aura enfin ramoné la cheminée supérieure de Foggiale décrite dans le topo de Fabrikant... Arnaud s'est retrouvé pour la première fois sur le sommet de Paglia Orba et n'avait encore jamais eu l'occasion de négocier une vraie cheminée... et Philippe a pu raviver dans sa mémoire une de ses nombreuses mini-escalades corses en famille ! |