Monte Incudine


                L'Incudine avec ses 2134 mètres d'altitude, est le point culminant du Sud de la Corse : au delà de son voisinage immédiat, il faut remonter de plus de quinze kilomètres vers le Nord pour trouver un autre sommet de plus de 2000 m (Punta Cappella avec ses 2041m), et de plus de vingt kilomètres pour trouver plus haut (le massif du Renoso culminant à 2352 mètres).
                En vacances au Sud de la Corse, il est donc naturel de vouloir accéder à ce sommet. Il sera facile d'y aller en deux jours, en empruntant le GR20 à partir du col de Bavella et en passant une nuit au refuge de l'Asinao. En revanche, si on cherche à faire un aller retour dans la journée, il faut bien étudier les guides (ou alors s'adresser à un professionnel).


                En épluchant la dizaine d'options du guide Didier Richard, il s'avère que l'itinéraire le plus facile consiste à rejoindre le GR20 à partir de la chapelle Saint Pierre dans la région de Zicavo (4h20 et 1000 mètres de dénivelé environ). Depuis le Nord, à partir de Chisa ou de Solara, des itinéraires originaux existent mais il faut compter 7 heures pour l'aller... Depuis les environs de Quenza, trois itinéraires sont proposés dont un de 3h30 pour à peine 700 mètres de dénivelé...
                Cette dernière option est bien tentante, d'autant plus que pour nous, Quenza nécessite bien moins de voiture que la Chapelle Saint-Pierre. Il nous faudra toutefois trouver la carte IGN « Petreto-Bicchisano-Zicavo » pour la première partie de la balade... Peine perdue, cette carte semble introuvable... (en fait nous la trouverons à Zonza au retour...) ; de toute manière l'itinéraire de l'Incudine doit être bien balisé à partir de Bucchinera, puisque l'itinéraire semble de loin le plus facile...
                N'oubliez pas de consultez les commentaires de Philippe François en fin de cette page, suite notamment à l'évolution, en 2011, du tracé du GR20 dans ce secteur...
                Nous voilà donc ce 22 août 1999 à 8h30 du matin à Bucchinera, au parking du refuge de ski de fond qu'on atteint à partir d'une petite route depuis Quenza. Première surprise : aucune voiture n'est garée ici, et pourtant la météo est idéale pour une balade en montagne (il fera un peu chaud peut-être !). Même sans carte, le départ est évident puisqu'il faut emprunter la piste qui se dirige vers le Nord. Si Castellu d'Ornuccio est bien identifiable, avec son entassement d'énormes blocs de rochers, tout comme quelques belles pozzines un peu plus loin, nous n'arriverons pas à repérer la source et la bergerie ruinée de Marinasca où il aurait fallu tourner à droite.
                Cette partie est un peu désagréable car de nombreuses mouches nous accompagnent... J'ai l'impression qu'en général, il y a nettement moins d'insectes, à altitude identique, en Corse que dans les Alpes, ce qui explique que David (c'était le jour de l'anniversaire de ses onze ans) se soit souvenu de ce détail : En effet, en préparant cette page, l'Incudine ne lui rappelait pas grand chose... et quand il a vu la photo ci-dessous, il a dit « Ah, je me souviens, c'est là où il y avait les mouches ! »
                Faute de trouver un sentier, nous continuons la piste avec l'idée de rejoindre la crête un peu plus loin. Après une intersection qui mène à la chapelle Saint-Pierre, la piste rejoint la ligne de crête puis tourne vers le Sud-Est pour s'arrêter à Punta di Tozzarella vers 1750 mètres d'altitude. Ici nous trouvons des ruines dont nous saurons plus tard qu'il s'agit des restes d'un ancien observatoire. La photo panoramique ci-dessous montre une vue remarquable sur le plateau de Coscione, mais aussi vers les hauts massifs du Nord de la Corse : Paglia Orba, à soixante kilomètres de nous est parfaitement visible...


                Nous devinons maintenant le col de Chiralba à la même altitude que nous (ce qui nous rassure car, pour la suite, la carte IGN « Aiguille de Bavella » pourra enfin nous aider). Nous suivons la ligne de crête, assez plate, pour atteindre sans aucune difficulté ce col. Maintenant, nous avons la carte, mais aucun sentier n'y est marqué... En fait il suffit de croire que la limite administrative indiquée sur la carte est un sentier et de la suivre pour arriver à l'Incudine... Cela correspond à peu près à la description du guide Didier Richard et cela marche... mais, il y a plus court comme nous le verrons au retour.
                A partir du col de Chiralba, la montée plein Est est nettement plus raide, mais il n'y a guère que 200 mètres de dénivelé jusqu'à la ligne de crête principale qui conduit à l'Incudine, et c'est d'autant plus facile que quelques traces de sentier indiquent la direction à suivre, en permettant de contourner deux ou trois petits obstacles.
                Après ce petit effort, la vue sur la vallée d'Asinao et les aiguilles de Bavella, où commencent à s'accumuler, comme d'habitude de nombreux nuages, est assez remarquable. On emprunterait bien quelques un de ces nuages, car il fait bien chaud ici... Hormis la chaleur, aucune difficulté pour longer vers le Nord cette ligne de crête sur un sentier bien marqué, cela jusqu'au GR20, qu'il faudra suivre durant un petit quart d'heure pour arriver au sommet aux alentours de midi.
                Si, nous n'avions vu personne, depuis le départ, il en est tout autrement maintenant : l'Incudine est un des plus hauts sommets du GR20, et c'est donc tout naturellement un point d'accumulation ! En fait, pendant la bonne demi-heure que nous y passerons pour le déjeuner, nous n'aurons pas réussi à prendre une seule photo de la croix sommitale exempte de visiteurs... Le paysage est très original vers Bavella bien sûr, et la côte Est avec les nuages tous plus bas que nous ; il est très ouvert dans toutes les autres directions, avec une vue remarquable vers la côte Ouest et les hauts sommets plus au Nord (inversement la dernière photo ci-dessous montre l'Incudine vue de Monte Renoso).





                Comme les enfants n'ont pas vraiment économisé leur ration de boisson, je me rends compte après le repas que nous allons un peu manquer d'eau pour le retour (il reste à peine plus d'un litre pour cinq personnes...) Certes il n'y aura que de la descente, mais tout de même quelques trois heures de marche... il vaudra mieux ne pas se fourvoyer !
                Nous ne nous éternisons donc pas là-haut, et lorsque, après avoir quitté le GR20, nous croisons un bon sentier qui se dirige vers le col de Chiralba (il n'est mentionné ni sur la carte, ni dans le guide), nous n'hésitons guère à le prendre (d'autant plus qu'à l'aller, j'avais repéré le départ d'un sentier qui semblait bien aller dans la direction voulue). C'est effectivement la meilleure option entre l'Incudine et le col de Chiralba, mais il fallait la trouver tout seul...
                Quelques minutes après avoir passé le col de Chiralba, nous nous retrouvons à l'aplomb de la piste à l'endroit où nous aurions dû bifurquer à droite au départ. Pas de sentier bien marqué, mais le cheminement semble être sans grande difficulté. Un peu moins de 200 mètres de dénivelé négatif, et nous nous retrouverons assez rapidement sur notre piste. Une bonne demi-heure de gagnée... ou plutôt de perdue au départ. Cela dit, avec les indications que nous avions, il aurait été très difficile de s'engager ici à l'aller...
                La dernière heure sur la piste sera assez désagréable, avec les insectes d'une part, et la soif d'autre part (je crois bien que c'est le jour de ma vie où j'ai eu le plus soif...alors que les coéquipiers ne s'en sont pas trop plaints... Ce n'est que lorsque nous arriverons (en voiture) à l'épicerie de Zonza que nous pourrons enfin étancher notre soif. Nous trouverons aussi la fameuse carte à la papeterie de Zonza (elle était fermée ce matin)... Je jette un œil sur le début du parcours pour m'apercevoir que nous serions passés tout près de la source de Marinasca ! L'aurions-nous trouvé avec cette carte ?

Six heures aller retour et 700 mètres de dénivelé : un itinéraire facile et agréable pour atteindre le sommet de la Corse du Sud...
Et pourtant aucune indication... Pourquoi réserver ce sommet aux seuls adeptes du GR20 ?






                Six ans plus tard, le matin du 14 août 2005, nous avons eu l'occasion de retrouver le sommet de Monte Incudine, mais cette fois-ci depuis un avion de tourisme. Voici quelques photos que nous avons ramenées ce jour-là, avec bien sûr des perspectives fort différentes... Les trois premières ont été prises à une altitude de 2500 mètres, environ un kilomètre à l'est du sommet, et la dernière depuis les envions de Porto Vecchio.


Monte Incudine ; au loin à gauche le golfe de Valinco ; dans le coin haut droit on peut deviner Ajaccio... La face est de Monte Incudine, et son sommet (aux environs du quart gauche de la photo) Au premier plan, Punta di u Fornellu et le vallon de Purcaraccia ; plus loin la vallée de la Solenzara Monte Incudine, au centre de la photo, depuis les environs de Porto Vecchio (à gauche, la baie de Stagnolu)




Quinze ans plus tard, en août 2014, à l'occasion d'un petit trek en étoile autour du refuge d'Asinau, Sophie et moi sommes retournés à Monte Incudine. Ci-dessous, le tour d'horizon saisi et pixelisé à cette occasion illustre enfin le panorama depuis le sommet. Pour lire le récit de ce trek et découvrir d'autres photos de Monte Incudine et du secteur entourant la vallée d'Asinau, consultez la page : sur les hauteurs d'Asinau !


Punta di Sistaja au centre ; légèrement à sa droite au loin, on devine Ajaccio Entre le Nord-Ouest et le Nord, se font remarquer : à gauche, la pointe de Mantelluccio ; au centre, Capu Tafonatu et Paglia Orba ; puis les connaisseurs pourront notamment identifier Punta alle Porte, Monte Cinto, Punta alla Vetta, Monte Rotondo, Monte Renoso et Monte Cardo ; à droite Punta a a Cappella sous un gros nuage Au quart gauche, Punta a a Cappella, puis au loin Monte San Petrone et Punta di Caldane ; vers la droite, Punta di Valli Tremuli toute proche

Tout à gauche, Punta di Valli Tremuli (2129m) ; au centre Punta Scarachiana (2126m) Vers l'Est, le col d'Asinau (1675m) sépare Punta di Tintennaja (2018m) à gauche et Punta Muvreraccia (1899m) à droite Au delà de la vallée de l'Asinau, Punta di u Furnellu (1899m) pointé par l'éminence rocheuse ; le sommet 1897m à sa droite Au-dessus de la vallée de l'Asinau, les Tours de Bavella ; au loin, à droite, le massif de Cagna Le massif de Cagna à gauche ; vers la droite, Monte San Petru devant le golfe de Valinco qu'on devine







Commentaires de Pierre Castelli
Le 24 août 2007


Comme vous pourrez le remarquer en lisant les quelques lignes qui suivent Pierre Castelli a beaucoup de souvenirs relatifs à l'Incudine, le sommet de la région où il a passé son enfance... Vous pouvez aussi retrouver son message sur le livre d'or, et le site de Michèle Castelli son épouse, écrivain.

                J'ai tout aimé dans votre site mais j'avoue que la photo panoramique de la Punta Tozzarella sur le Cuscionu et la remontée vers les différentes cimes visibles de l’alta strada, m'a vraiment touché car elle m'a rappelé l'émotion ressentie il y a bien longtemps quand jeune garçon, un peu plus âgé que David quand même (moi aussi je n'ai pas oublié... les mouches mais curieusement cet été, entre le Castellu d'Ornicciu et les ruines de l'observatoire "avorté", ces bestioles étaient moins gênantes; ou bien est ce moi qui suis plus patient ?).
                L'émotion donc fut alors d'apercevoir sur l'horizon, à une distance qu'à l'époque je croyais bien inférieure à 6O km, l'arête de la Paglia Orba, car le ciel était si pur qu'il me semblait qu'elle était là... tout près. Je n'oublierai jamais cet instant !
                Curieusement je n'ai jamais pris de photo parvenu au sommet !

Monte Incudine depuis la Punta di u Furnellu
Monte Incudine depuis les bergeries ruinées d'Asinao
Monte Incudine apparaît à gauche de l'érable
                En agrandissant cette vue du massif de l'Incudine (vu ce mois d'août 2007 de la Punta di u Furnellu), vous remarquez sur la gauche le rocher levé à 45 ° dit l'Alcudina (l'enclume) qui donne son nom à la montagne et à droite la plate-forme sommitale où l'on distingue la croix.
                Saviez vous qu'il y a encore une trentaine d'années, presque à l'aplomb du sommet et légèrement à gauche dans une combe occupée actuellement par des bancs d'épineux (taches rousses) et les aulnes rampants (taches vertes) il pouvait se maintenir en plein mois d'août et donc jusqu'aux neiges de l'hiver suivant, un très beau névé d'un blanc immaculé de 200 mètres de long, de pente conséquente et de plusieurs mètres d'épaisseur. Adolescent, j'y ai pris quelques bains de soleil... Depuis les années 70 plus rien ! Réchauffement climatique ?
                Sur cette image, en bas à gauche du cône clair formé par le «pierrier», le fin ruban clair qui serpente vers le sommet (ou vers le bas c'est selon) , c'est l'actuel GR 20 dans l'avant dernière "étape" sens Nord-Sud (refuge d'Usciolu-refuge des Paliri).
                Evidemment, le sentier contourne le pierrier, mais je dois confesser qu'étant gamin (je suis âgé de 65 ans à ce jour) je me suis quelque peu fourvoyé dans cette rocaille et en ai rapporté quelques souvenirs cuisants !!! Ne riez pas !
                Le refuge d'Asinao est en contrebas.

                La seconde vue, c'est l'arrivée par une bretelle du Gr 20 venant de Bavella aux bergeries ruinées (pour la plupart) d'Asinao. Autrefois, toutes étaient debout et "peuplées". J'y ai passé des séjours inoubliables...
                Au-dessus, un œil même peu exercé, distingue le refuge. Plus haut la crête avec de gauche à droite: le fameux rocher , puis le sommet, et "devant lui" A Punta di Valli Tremulli apparemment plus élevée, mais en fait moins haute de…20 mètres. Enfin, à droite A Punta Scarachiana.

                Sur la troisième image, après avoir dépassé les bergeries et tout en remontant vers le col, on voit bien de ce point de vue la plate-forme sommitale et la croix. L'érable qui m'a servi de premier plan végétal dans tout ce désert minéral, masque le reste de la chaîne ?

                J'ai pensé que cette vue de la hêtraie qui entoure la Chapelle Saint Pierre au dessus de Zicavo, point de départ de l'un des différents sentiers d'accès à l'Incudine, vous plairait ?
                Elle a été prise le 1er novembre 2006, en fin d'après midi, soleil couchant, un peu avant la tombée de la nuit. Il faisait froid (6°) et nous étions à cette heure là et en cette saison là, seuls là haut... avec les loirs, dans les hêtres. Nous ne les avons pas vus, cela va sans dire… D'ailleurs, ils devaient sans doute hiberner !




Commentaires de Philippe François
Le 18 mai 2012


Philippe François a réalisé le parcours entre le refuge de Bucchinera et l’Incudine au printemps 2012, et rend ici compte d’éléments nouveaux qu’il est utile de connaître si vous souhaitez entreprendre cette randonnée.

                J'étais en Corse la semaine dernière, j'ai effectué l'ascension de l'Incudine vendredi 18 Mai 2012 et j'aimerai ajouter quelques compléments à votre description sur la randonnée depuis le refuge de Bucchinera : tout d'abord la route qui depuis Quenza nous amène au centre de ski de fond est étroite et en très mauvais état, il faut être extrêmement prudent.
                Ensuite le tracé du GR 20 ayant été modifié, on trouve les marques blanches et rouges, peu de temps après avoir passé la source de Marinasca (suivre les cairns depuis la piste) et qui vous mènent non pas directement au sommet puisque dorénavant le GR20 évite l'Incudine mais au col qui surplombe le refuge d'Asinao et qui offre la superbe vue sur les aiguilles de Bavella. Le sommet est atteint en suivant l'ancien tracé.
                Dernier commentaire et pas des moindres, comme vous le soulignez dans votre texte, en été attention à la chaleur si l'heure de départ est tardive. On a beau progressé entre 1500 et 2100 mètres d'altitude, à aucun moment le chemin n'est ombragé, c'est un plateau magnifique, ses pozzines, ses cochons et chevaux en liberté mais c'est un plateau et pas une forêt.
                Voici le tracé gps de mon parcours avec les points de bifurcation.


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