Punta Dell'Oriente


                Monte Dell'Oriente, vous ne connaissez peut-être pas, mais c'est un des plus hauts sommets du Sud de la Corse ; de plus, il est accessible en 3 heures environ à partir du col de Vizzavona, le col sur la route nationale 193 le plus fréquenté... Les différents guides en parlent très peu... la balade ne doit pas être extraordinaire... en tout cas c'était notre état d'esprit ce 23 août en partant pour cet balade dont le principal avantage était sa proximité par rapport à notre lieu de résidence.
                Quelle surprise... ce sera une de nos plus belles balades, peut-être même la plus belle en terme de rapport qualité prix (le prix étant bien entendu ici synonyme de difficulté) !!! Quant à la fréquentation, ce jour là, nous avons rencontré quelques personnes entre le parking et Punta Grado à 1600 mètres (qui peut d'ailleurs déjà être un intéressant objectif pour le panorama), mais personne au-delà ! Et dire qu'autour du col, des centaines de voitures sont garées pour des balades dans la vallée de l'Agnone, et autour des cascades des Anglais, des coins bien sûr chouettes ; la différence ? Contrairement à Punta Dell'Oriente, tous les guides en parlent... Un des charmes de la Corse c'est aussi cela : des coins extraordinaires à découvrir, mais dont personne ne parle !
                Pour avoir une idée du paysage autour du Punta Dell'Oriente, arrêtez-vous donc au pont de Sellola, le dernier pont sur la Gravona avant le col de Vizzavona. L'ancienne route qui traversait la rivière fait office de parking (vos enfants pourront d'ailleurs barboter dans quelques vasques), et en remontant sur quelques dizaines de mètres le sentier en rive gauche (côté Ajaccio), vous retrouverez le paysage que vous voyez sur cette photo (cliquez dessus).


                S'agissant plutôt d'une petite balade, nous partons relativement tard, et nous serons à pied d'œuvre au col de Vizzavona vers 8 heures du matin, à 1163 mètres d'altitude. A cette heure-ci le parking du col est vide, à l'exception de deux camping-cars qui y avaient passé la nuit. Le départ est évident : il faut suivre (à pied) le chemin bitumé qui monte vers le sud-est en direction du relais, où un panneau en bois indique même le chemin à suivre pour atteindre les bergeries des Pozzi. A plusieurs reprises, de petites saignées entre les arbres permettent de jeter un oeil sur les ruines du château-fort juste au nord du col de Vizzavona, comme vous pouvez le constater sur les deux premières photos ci-dessous. Si vous passez par là avec des enfants, arrêtez-vous donc à ce col : ils seront ravis de grimper les quelques 50 mètres pour explorer les ruines.
                On arrivera à la bergerie des Pozzi après trois quart d'heure sur un sentier bien agréable entièrement en sous-bois. Juste avant la bergerie, après une petite source, le sentier monte assez raide à gauche, en sortant de la forêt. Nous atteindrons un petit replat vers 1500 mètres, où nous commençons à dominer les vallées de la Gravone vers le sud ouest et de l'Agnone vers le Nord, dans laquelle on arrive à deviner certaines des chutes d'eau des cascades des anglais .
                C'est à ce replat que nous rencontrons le berger des Pozzi, qui nous rejoignait par un autre sentier. Peut-être cherchait-il son âne qui se reposait tranquillement ici, ou alors avait-il envie d'engager un brin de conversation avec nous ? En tout cas, nous avons un très bon contact, et il est ravi de nous montrer les différents points caractéristiques de la balade et de nous présenter les environs. Nous devrions être séduits par cette balade peu connue, nous explique-t-il, avec un cheminement presque évident le long de la ligne de crête qui démarre à Punta Grado bien visible, à peine 100 mètres plus haut. Le berger nous propose même un petit raccourci qui évite le détour par le rocher de la Madonuccia, un peu plus au Nord.
                Nous arriverons à Punta Grado, à mi-chemin vers 9h45, où nous prendrons les deux dernières photos de la série ci-dessous. Si vous cliquez sur l'avant dernière photo, vous verrez bien, au premier plan, le replat de tout à l'heure, tout en bas les ruines du château fort, le parking un peu à sa gauche, et en face la vallée de l'Agnone tant convoitée. Et au centre de la dernière photo, voilà enfin Punta Dell'Oriente, notre objectif de la journée.
                A partir de Punta Grado, le cheminement est effectivement évident le long de la ligne de crête. Pour autant, il est loin d'être monotone. Une descente de quelques mètres, parfois quelques aulnes à traverser, parfois quelques raidillons, et un sommet intermédiaire à portée de vue : Punta Scarpaccia à 1800 mètres d'altitude environ.
                Le paysage devient très sauvage en direction de la vallée de Gravona, et les trois pains de sucre visibles depuis de pont de Sellola sont maintenant tout proches. Vers 1950 mètres, un énorme monolithe juste à droite du trajet marque un embranchement qui permet de rejoindre Monte Renoso : une bonne idée pour une Grande Randonnée d'une douzaine d'heures de marche, passant par les très sauvages Pinzi Corbini, le superbe lac de Bastani, la station de ski de Capanelle et retour à Vizzavona par le GR20 et Bocca Palmente, mais ce sera pour une autre fois, peut-être.





                Il est onze heure, nous sommes maintenant au pied de Monte Dell'Oriente et une vingtaine de mètres peut-être nous séparent du sommet et de sa croix. Le guide Didier Richard prévient "Seuls les derniers mètres dans un rocher qui s'effrite demandent quelque attention", nous l'aurions constaté nous même... Arriverons-nous tous les cinq à la croix ? c'est pas totalement gagné... Si vous faites cette balade, même si vous restez là, vous aurez quand même profité de l'essentiel du paysage, regardez par exemple ce que vous verrez en direction de Monte d'Oro.
                Admirez la vallée de l'Agnone au centre, empruntée par le GR20 qui rejoint le refuge de l'Onda de l'autre côté du col situé entre Migliarello et Monte d'Oro ; la Pointe des Sept Lacs (juste au dessus des lacs de Melo et de Capitello bien connus), Paglia Orba à peine visible, et Monte Rotondo, le deuxième sommet de la Corse.



                Nous nous débarrassons des sacs à dos : de toute manière c'est ici que nous déjeunerons. Nous mettons assez longtemps pour les derniers mètres ; il faut utiliser ses mains, mais il est difficile de saisir les prises car ces rochers fort granuleux irritent les doigts (je crois bien qu'avec des gants adaptés, on aurait été bien plus rapide, mais les randonneurs n'ont pas l'habitude d'emmener ce genre de matériel). Nous finirons par arriver à la croix tous les cinq, avec les bouts des doigts bien rouges...
                En fait, la croix ne se trouve pas exactement au sommet, mais celui-ci, un ou deux mètres plus haut paraît difficilement accessible sans équipement ; même David, qui dans ce genre de situation est le premier à solliciter une tentative reste muet... Je le teste : "on essaye d'aller au vrai sommet ?" pour une réponse immédiate "oui, mais comment on fait ?" Il avait donc déjà étudié la question !
                Il est 11h15, la séance photo est bien entendu de rigueur, en voici quelques unes. Regardez bien la photo de gauche qui est un agrandissement de la première photo de cette page, et bien, les Pinzi Corbini, nous les revoyons maintenant en contrebas sur la seconde photo, dominés au fond par Monte Renoso : la grande balade évoquée tout à l'heure devient de plus en plus tentante... Sur la photo centrale, à nouveau la vallée de l'Agnone, derrière un rocher du type de ceux qui font mal aux doigts...





                Comme le repas nous attend un peu plus bas, nous ne nous attardons pas trop longtemps. Pendant que mes co-équipiers redescendent, j'essaie de contourner un peu le sommet principal pour trouver une hypothétique voie d'accès... mais rien d'évident, et de l'escalade sans pouvoir utiliser réellement les mains pour les raisons que vous connaissez, ce n'est pas facile.
                Nous voici donc en train de déjeuner, en contrebas du sommet... Mes doigts ont été suffisamment abîmés pour ressentir un bon picotement en tenant les quartiers d'orange au dessert... Nous aurions bien aimé discuter un peu avec d'autres randonneurs pendant cette pause, mais pour l'instant nous n'avons rencontré que le berger !

                Peu après douze heures, nous nous remettons en route pour redescendre par le même chemin ; il y a maintenant un vent assez soutenu sur la ligne de crêtes, au moins 25 nœuds, avec une température idéale, ce qui convient bien à tout le monde ou presque, puisque David ne pense plus qu'à la séance de planche à voile qu'il est en train de louper (ce qui est d'autant plus rageant qu'il y avait peu de vent les jours précédents sur la côte). J'ai beau lui expliquer que ce n'est peut-être qu'un effet local, rien n'y fait... Nous profitons totalement du paysage grand ouvert (alors qu'il fallait se retourner à l'aller), entre Ajaccio, la vallée de la Gravona d'un côté et la grande vallée de l'Agnone se prolongeant par la vallée du Vecchio, puis celle du Tavignano, vers Corte.
                A mi-chemin, du côté de Punta Grado, nous rencontrons successivement deux couples qui se sont retrouvé par là en s'engageant vers midi, un peu au hasard à partir du col de Vizzavona, et qui visiblement étaient plus que ravis par leur balade ; évidemment, je ne peux pas m'empêcher de jouer le rôle du berger de tout à l'heure en leur expliquant la suite du parcours (mais je crains que Monte Dell'Oriente soit resté un objectif un peu trop lointain pour eux). A nouveau la bergerie, nous profitons de la petite source pour nous désaltérer avec de l'eau bien fraîche (attention, c'est le seul point d'eau de la balade) puis le dernier tronçon à l'ombre des arbres... Nous serons de retour autour de 15 heures, un peu trop tôt par rapport à nos habitudes, mais un peu trop tard pour enchaîner avec une séance de planche à voile.

                Une balade chouette et sans histoire, et pourtant bien des choses à raconter. Si vous avez quelques heures à passer dans le coin, et si vous n'aimez pas les bains de foule du côté des cascades des anglais, pensez-y.

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