Depuis la côte Est, au sud d'Aleria, l'horizon est barré par un chaînon long de 25 km dont l'altitude moyenne est de l'ordre de 1800m. Michel Fabrikant l'appelle le chaînon du Fiumorbo (nom de la micro-région située entre lui et la mer). Ce chaînon fait partie des reliefs de Corse que nous n'avons pas encore visité, et comme nous résidons cette année dans le secteur, il paraissait naturel d'en découvrir le point culminant, à savoir Punta a a Cappella (2042m). Il est tout à fait possible d'atteindre le sommet en partant d'Isolaccia di Fiumorbo, mais le dénivelé est conséquent (environ 1400m). Comme Sophie a envie d'une journée plutôt tranquille, nous choisissons la voie normale qui emprunte le GR20 depuis le col de Verde jusqu'au pied des blocs sommitaux. Le dénivelé n'est que de l'ordre de 900m, et il ne devrait y avoir aucune difficulté d'orientation. En revanche, le parcours routier via le défilé de l'Inzeca et Ghisoni est bien plus long depuis la côte Est. |
Départ du Col de Verde vers 10h du matin seulement : nous ne sous sommes certes pas levés très tôt, mais nous avons bien sous-estimé le temps nécessaire pour rejoindre le col. Une piste balisée par la fameuse marque blanc-rouge s'embranche en face du parking, et pénètre dans la forêt de hêtres. A peine 300 mètres plus loin, nous rejoignons une seconde piste que nous quittons presque immédiatement pour prendre un bon sentier relativement raide. Une demi-heure plus tard, nous arrivons au point P1, où une éclaircie de la végétation offre une belle vue sur la crête de Punta Bocca dell Oro et sur Punta di u Prati (voir ci-dessous les quatre premières photos prises en fin de journée, car le matin, ces reliefs sont à contre-jour). Un peu plus loin, en contrebas, nous passons devant le terminus d'une piste pour 4x4 et un enclos ; il s'agit peut-être du point de départ pour le ravitaillement du refuge de Prati. Une zone plus ou moins horizontale longue d'environ 1km nous attend maintenant, et nous nous retrouvons à nouveau en forêt. Après avoir franchi deux lits de ruisseau, le sentier recommence à bien grimper, jusqu'au pied de la pointe cotée 1775m. C'est là que nous sortons définitivement du couvert végétal, avec Bocca d'Oru en vue, quelques deux cent mètres plus haut. Cette montée vers le col est un peu monotone, voire pénible, d'autant plus que Sophie est moins en forme et plus lente que d'habitude ; j'arrive toutefois à la convaincre d'attendre l'arrivée au col pour faire une pause. Au col, à 1840m d'altitude, la vue s'ouvre sur toute la côte Est entre les environs de Prunete et de Solenzara, à l'exception d'une petite zone cachée par le dôme 1869m. Derrière nous, le panorama sur les reliefs à l'ouest permet de reconnaître notamment Monte Renoso, Punta dell Oriente, Monte d'Oro et Monte Rotondo. Je profite de la pause promise à Sophie pour rejoindre P2 que je crois être un sommet secondaire. En réalité, ce n'est qu'un faux plat sur la crête menant à Punta Bocca dell'Oro. Rejoindre le sommet en vue prendrait trop de temps, mais les quelques 30 mètres gagnés permettent d'avoir une belle vue sur la ligne de crête dominée à droite par Punta di u Prati, et sur Punta a a Cappella, notre objectif. |
Des cumulus commencent à se former sur le versant Est , à notre altitude, ce qui me fait un peu douter de la réussite de la balade : j'imagine en effet Punta a a Cappella enveloppée de coton une bonne partie de l'après-midi... Je redescends rapidement au col et presse Sophie d'écourter la pause pour arriver le plus vite possible au sommet... Nous voilà donc repartis à un rythme plus soutenu ce qui, dans un premier temps n'est pas bien difficile, car deux kilomètres relativement plats nous attendent. Les nuages à notre gauche sont de plus en plus nombreux, de sorte que nous ignorons le refuge de Prati (nous avons assez d'eau pour ne pas faire de complément). Voilà maintenant le dôme P3 à négocier (à peine 150m de dénivelé), et nous gardons toujours notre rythme soutenu... jusqu'à ce que Sophie subisse un vrai coup de barre à quelques encablures du somme... J'avais occulté le fait qu'elle avait déjà eu quelques difficultés pour atteindre le premier col ! Nous voilà maintenant arrêtés au milieu des aulnes, non loin du sommet du dôme. L'arrêt se révèle fort long, je m'inquiète de plus en plus et finis même par être persuadé qu'il va falloir faire demi-tour. Au bout de trois quarts d'heure, Sophie m'annonce que cela à l'air d'aller, et me propose de continuer. Entre temps, les cumulus ont eu la bonne idée de s'évaporer au lieu d'envelopper les sommets ! Nous progressons maintenant plus doucement... et Sophie n'aura plus d'autres soucis. Au sommet du dôme P3, nous découvrons Punta a a Cappella avec sa croix. La suite de l'itinéraire, le long d'une paroi rocheuse semble bien plus délicat, et il va falloir commencer par redescendre vers le point P4, une cinquantaine de mètres plus bas. J'ai d'ailleurs du mal a imaginer le cheminement du GR20 dans cette zone. Bien entendu les signes blanc-rouge permettent de contourner au fur et à mesure tous les obstacles, même si un ou deux passages pourraient se révéler délicats avec un sol mouillé. Un groupe d'une dizaine de personnes bloque un passage un peu délicat ; en accord avec Sophie, et plutôt que d'attendre, nous essayons d'éviter le groupe par un cheminement qui me semble possible. Nous nous retrouvons devant un petit mur qui nécessite un peu d'agilité... Cela passe bien... petit souci quand même : un autre randonneur nous a suivi, sans se rendre compte de sa sortie de la trace officielle. Comme il a l'air d'être un peu énervé, je lui explique que les traces sont à une ou deux minutes derrière... Voyant que Sophie et moi avons passé l'obstacle, et après lui avoir assuré que c'était la seule difficulté avant de revenir sur la trace, il fait de même. Après ce passage, le GR20 redevient un sentier facile jusqu'au pied des blocs sommitaux. Une quarantaine de mètres de dénivelé nous séparent de la croix. Je m'engage sur les premiers blocs, en m'apercevant que ce sera une sacré galère : pas de danger objectif, mais les aulnes ont envahis les intervalles entre les blocs... Sophie me propose le demi-tour, en m'expliquant qu'il y a certainement un passage plus facile. Elle a raison : juste avant que le GR20 ne quitte définitivement la zone, une trace semble démarrer entre les aulnes et les blocs. Celle-ci se confirme par quelques cairns, et surtout par le cheminement d'un autre couple en train d'arriver au sommet. |
Ce cheminement final n'est toutefois pas de tout repos, mais il est assez ludique, et à la portée de la plupart des randonneurs. La croix est située sur une dalle inclinée, où certaines personnes ne seront pas à l'aise, mais d'autres dalles à proximité immédiate permettent de s'installer confortablement au sommet. Nous en choisissons une pour un déjeuner un peu tardif (il est tout de même déjà 14h30) et bien mérité. Comme nous nous y attendions, le panorama est tout à fait exceptionnel. Le secteur Sud est malheureusement à contre-jour avec un peu de brume, mais de part et d'autre de la vallée du Taravo, l'Incudine, les reliefs de la Cagna et la pointe de Mantelluccio ressortent bien dans le paysage. Plus près de nous, la vallée est encadrée à gauche par la suite du chaînon avec Bocca di Laparo puis Punta Furmicula, et à droite par un autre chaînon portant notamment Monte Giovanni, Punta di a Cuperchiata et Punta di a Vena. Le fond de la vallée est garni d'une forêt très verdoyante, d'où ressortent les villages de Palneca et de Cozzano. Vers l'ouest, voici autour des Pozzi, Punta Scaldasole, Punta alla Vetta et Monte Renoso. En regardant plus au Nord, se succèdentPunta dell Oriente, Monte d'Oro, a Maniccia, Monte Rotondo, Monte Cardo et même Cima a i Mori. Au Nord, le chaînon de Fiumorbo offre un beau spectacle avec ces alternances entre zones rocheuses et larges pāturages. Au delà de Punta Bocca dell Oro, nous reconnaissons Monte San Petrone et Punta di Caldane, ce dernier sommet étant l'objectif de balade du lendemain. La côte bordée de nombreux étangs et la mer Thyrénienne complètent à merveille le tableau vers l'Est. Le sentier du GR20 s'étire entre Bocca d'Oru au Nord et Boca di Laparo au Sud. et il chemine quarante mètres plus bas... Si vous passez par là, je ne saurai trop vous conseiller de faire le détour, en vous séparant de votre gros sac à dos bien sûr ! |
Comme nous avons pris beaucoup de retard, nous ne nous attardons pas au sommet, et levons l'ancre à 15h00, après le déjeuner et bien entendu les traditionnelles photos permettant aujourd'hui de mieux garder en mémoire l'ensemble de ce tour d'horizon. Le retour vers le col de Verde par le même itinéraire ne nous réserve aucune mauvaise surprise. Les quelques passages un peu délicats pour rejoindre le GR20 se négocient plus facilement qu'à la montée, en se laissant parfois glisser le long des blocs. Nous faisons un arrêt au refuge de Prati, pour compléter nos réserves d'eau (il fait relativement chaud, même à 2000 mètres d'altitude). Nous nous offrons également quelques haltes photos, tantôt pour bénéficier d'un éclairage plus adapté qu'à l'aller, tantôt pour compenser l'absence de photos à l'aller dûe à notre empressement, en particulier dans le secteur du refuge de Prati. Nous retrouvons notre voiture à 18 heures, finalement bien contents d'avoir pu réaliser notre objectif comme prévu, malgré les quelques aléas au cours du parcours aller. |